Lufthansa et Air France : même combat ?

L'Airbus A380 « Finne » de la Lufthansa (D-AIMG). Crédit : Lufthansa.
Les deux compagnies doivent affronter la fronde de leurs salariés alors que toutes deux peinent à faire face à la concurrence.

La Lufthansa vient de subir la grève la plus longue de son histoire. De quoi rappeler au monde entier que les Français et Air France n’ont pas le monopole des mouvements sociaux… Mais les problèmes des deux compagnies ne sont pas similaires.

A la Lufthansa, le personnel a fait grève contre un changement dans la garantie de retraite complémentaire qui doit être versée à chaque salarié. Dans les faits, la Lufthansa garantissait jusqu’à présent jusqu’à 1 000 € de retraite complémentaire à chacun. La faiblesse des taux d’intérêt et l’allongement de la durée de vie a poussé la compagnie à offrir plutôt au personnel navigant partant en retraite anticipée, de reculer d’un an l’âge de celle-ci (56 ans au lieu de 55) et de toucher l’intégralité du capital en une fois, libre à lui de le placer ensuite. Cette proposition touche un nerf sensible en Allemagne, où l’allongement de la durée de vie, couplé à la faible la natalité, ne permet plus de regarder avec un œil serein l’arrivée à la retraite de millions d’Allemands nés après-guerre.

La Lufthansa fait elle aussi les frais d’une politique sociale généreuse qui rend tout alignement sur le marché européen difficile, à l’heure de la domination de Ryanair et de l’envol d’Easyjet. Le personnel navigant qui travaille jusqu’à 65 ans touche 96 % de son dernier salaire. Le plus bas salaire à l’embauche est de 2 200 €, avec une augmentation de salaire de près de 3 % chaque année pendant dix ans, bien plus généreuse que chez les compagnies concurrentes.

Résultats trimestriels

De ce point de vue, la crise que traverse Air France a des similitudes avec celle de la Lufthansa. La compagnie à la grue a elle aussi été en difficulté financière, et l’année 2014 a été marqué par une grève des pilotes longue et coûteuse, notamment en terme d’image.

Financièrement pourtant, la Lufthansa s’en sort mieux. La compagnie a réalisé 30 Md€ de CA en 2014 pour 106 millions de passagers transportés, pour un bénéfice net de 55 M€, plombé par une grève des pilotes. Confronté à une grève similaire, Air France KLM avait enregistré une perte nette de 182 M€ pour 25 Md€ de CA.

Les changements ont fini par porter leur fruit. Le retour de la compétitivité s’est fait sentir finalement au troisième trimestre de 2015 pour Air France, qui a enregistré des résultats bien meilleurs que prévu, avec un bénéfice net de 480 M€. Mais sur les neuf premiers mois de l’année, les difficultés perdurent, avec une perte nette de 158 M€. La Lufthansa a réalisé un bénéfice net au troisième trimestre de 794 M€, et de 1,75 Md€ sur neuf mois.

Alors que la Lufthansa a pu mettre sur pied sa filiale low cost Eurowings à marche accélérée, Air France a dû renoncer à Transavia Europe après la grève de 2014. La compagnie allemande peut aussi capitaliser sur son activité fret, qui marche bien, alors qu’elle est un boulet pour Air France. Mais si la Lufthansa a réussi à redresser son activité après des années 2009-2010 de crise, pourquoi pas Air France ?

Cet article a été publié dans le numéro 0.1 d’Aerospatium, daté du 14 novembre 2015.

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