Les congratulations entre les présidents américains et turcs, qui vantent ensemble leur amitié de longue date sur fond d’offensive au Rojava kurde et de crise des missiles russes, donnent raison à Emmanuel Macron dans son jugement lapidaire sur la direction de l’Otan. Donald Trump et Recep Tayyip Erdoğan, soutenus par les franges populaires et nationalistes de leur électorat, se ressemblent jusque dans leur détestation du Capitole : l’Américain en raison de la procédure de destitution à son égard, le Turc pour sa reconnaissance du génocide arménien.
Peu importent la diplomatie et les victimes collatérales, ces deux là finiront par s’entendre. La realpolitik et les intérêts personnels font toujours bon ménage.
Mais sans cohérence diplomatique, que devient l’Otan ? L’alliance est un bel outil, qui a déjà fait ses preuves. Il serait dommage de le laisser devenir un canard sans tête. Ses membres Européens sont divisés, entre ceux qui sont prêts à tout accepter pour un parapluie américain de plus en plus virtuel, et les tenants, comme la France, d’une autonomie stratégique.
Le dernier locataire de l’Élysée a tenu le cap de cette logique gaullienne en réinvestissant dans la base industrielle et technologique de défense. Pour être efficace, cette logique devrait être reprise au niveau européen, mais cela coûtera cher et nombre de pays vont traîner des pieds. S’il est confirmé avec ce portefeuille par le Parlement européen, le nouveau commissaire français à Bruxelles, Thierry Breton, aura donc fort à faire. Qu’un Français joue ce rôle peut être un atout pour soutenir une vision stratégique gaullienne, mais un désavantage face à tous ceux qui confondent cette vision avec la morgue et l’arrogance couramment attribuées aux Français.