Le feuilleton du renouvellement des appareils de la Composante Air des armées belges se poursuit, mais le débat occulte un élément clé, qui verrouille l’actuel appel d’offres : le futur avion de combat devra être capable d’emporter l’arme nucléaire américaine dans le cadre de l’Otan. Vingt bombes B61 sont entreposées à cette fin sur la base limbourgeoise de Kleine-Brogel. Une nouvelle version, déployée à partir de 2022, ne sera compatible qu’avec le F-35 de Lockheed Martin. Les Belges partagent le douteux privilège de pouvoir larguer la bombe de Washington avec les Allemands, les Italiens et les Néerlandais.
Les Britanniques, membres de l’Otan, clients du F-35 et puissance nucléaire eux-mêmes, ont renoncé à la composante aérienne de leur dissuasion. Pour quelle raison les Belges devraient-ils encore participer à celle de l’Otan et héberger sur leur territoire les armes de destruction massive d’un autre gouvernement ? Ce qui pouvait éventuellement avoir du sens à l’époque où l’on redoutait un déferlement de chars soviétiques dans la grande plaine d’Europe du Nord, en a-t-il encore en cette ère de conflits asymétriques, de cyberattaques et de terrorisme urbain ? Trois décennies après Tchernobyl, qui songerait à employer l’arme nucléaire sur un théâtre européen ?
Alors que le 6 octobre, le Prix Nobel de la Paix a été décerné à la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires, la Belgique doit savoir si elle souhaite véritablement sacrifier son industrie aéronautique et sa dimension européenne afin de préserver les reliques d’un autre temps, dont ne se souvient même plus la génération qui arrive aux affaires aujourd’hui.
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