Comme on le soupçonnait, la prochaine génération d’Ariane aura finalement le même diamètre que la version actuelle, à savoir 5,4 m. Le corps central d’Ariane 6 ressemblera donc à ce qu’il est : une version redessinée de celui d’Ariane 5. Les premières vues de cette nouvelle architecture ont été dévoilées le 4 novembre, lors du colloque sur l’avenir des lanceurs européens organisé par l’Académie de l’Air et de l’Espace (AAE) à Paris. Initialement, un diamètre plus faible avait été envisagé afin de pouvoir utiliser les mêmes dômes métalliques sur les quatre réservoirs du lanceur, et en réduire ainsi le coût de production par effet d’échelle. Or les besoins d’emport du réservoir d’oxygène liquide de l’étage supérieur étaient trop faibles pour justifier un diamètre de 5,4 m. Qu’à cela ne tienne, sa capacité ne sera pas optimisée et tous les réservoirs reprennent le diamètre d’Ariane 5. Un réservoir d’oxygène plus grand mais moins cher à produire permettra d’augmenter les performances si le besoin s’en fait sentir. C’est la leçon apprise de SpaceX : pour être compétitif aujourd’hui, un lanceur doit être plus optimisé en matière de coût que de performance.
L’autre évolution majeure concerne les cônes avant des accélérateurs P120C. Ceux-ci ont été très significativement allongés pour permettre un accrochage non plus au niveau d’une bride enserrant le réservoir d’hydrogène du premier étage, mais de la jupe inter-réservoirs de ce même étage. Cette solution techniquement plus simple améliore l’aérodynamique d’ensemble..
Revue de définition préliminaire mi-2016
« Les grands choix techniques sont figés » a annoncé Alain Charmeau, Pdg d’Airbus Safran Launchers. « Dans quelques mois, seront définies les spécifications des équipements, des structures et de l’électronique de bord. » Un plateau projet a été mis en place par ASL sur son site des Mureaux, en banlieue parisienne, afin de travailler en coordination avec ses partenaires industriels dans le cadre du contrat signé le 12 août dernier avec l’ESA. Ce contrat comporte une enveloppe de 680 M€ pour couvrir les activités jusqu’à la revue de définition préliminaire prévue à la mi-2016 et prélude à la confirmation définitive du programme lors de la conférence ministérielle de Lucerne (Suisse). L’industrie devra alors confirmer le plafond de coût du programme et s’engager sur les coûts récurrents. La commercialisation du lanceur débutera simultanément, avec une commande pour les premiers approvisionnements longs dès le premier semestre 2017 et la commande d’un premier lot de lanceurs mi-2018.
Remplacer Ariane 5 en 2023
Le premier vol reste prévu en 2020 pour un remplacement d’Ariane 5 à l’horizon 2023. Le passage de relais entre les deux lanceurs sera une phase critique qui fragilisera temporairement l’accès à l’espace en Europe. Toute défaillance de l’un ou l’autre système ne pourra pas être compensée. L’objectif est de produire annuellement onze corps de lanceur Ariane 6 et 35 étages P120C à répartir entre Ariane 6 et Vega C.
L’intégration du maître d’œuvre d’Ariane (et des vecteurs de la force stratégique) avec un effectif de plus de 8 000 personnes sur seize sites devraient être accomplie au début de 2016.
Premiers travaux en Guyane
Le Cnes vient d’achever les phases de défrichage et de terrassement des 170 hectares du futur site de l’ELA-4 – site de lancement des Ariane 6 – entre les ensembles de lancements Ariane 5 et Vega d’une part, et le site Soyouz d’autre part. Les travaux sur les infrastructures démarreront à la mi-2016 en vue d’une qualification du site en 2019. Les Ariane 6 y seront intégrées à l’horizontale puis redressées sur une table fixe conçue pour accommoder d’éventuelles évolutions, comme une version Ariane 66 à six accélérateurs. A l’instar des Soyouz, Ariane 6 sera protégée par un portique mobile afin de faciliter les interventions de dernière minute.
Cet article a été publié dans le numéro 0.1 d’Aerospatium, daté du 14 novembre 2015.