L’ultime repos de Rosetta

L'orbiteur Rosetta et le noyau de la comète 67P. Crédit : ESA, J. Huart.
L’ESA a confirmé son intention de finir la mission Rosetta en beauté en posant l’orbiteur à la surface du noyau de la comète le 30 septembre prochain.

Lancée le 2 mars 2004, la sonde européenne Rosetta est sur le point de boucler sa seconde année à graviter autour du noyau de la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko. Arrivée à pied d’œuvre le 6 août 2014, Rosetta a largué à la surface du noyau l’atterrisseur Philae le 12 novembre. Elle a ensuite observé la hausse de l’activité de la comète au fur et à mesure que celle-ci se rapprochait du Soleil et au-delà de son passage au périhélie, le 13 août 2015.

Un an plus tard, l’activité de la comète est en nette diminution et celle-ci s’éloigne du Soleil. Pour Rosetta, cela signifie une diminution de la puissance délivrée par ses panneaux solaires et à terme l’impossibilité de poursuivre sa mission.

« Nous essayons de réaliser autant d’observations que possible avant de manquer de puissance », reconnaît Matt Taylor, responsable scientifique pour Rosetta à l’ESA.

Bien que la sonde ait auparavant survécu à une hibernation de 31 mois sur une portion éloignée du Soleil de son orbite d’interception de la comète, une nouvelle mise en hibernation n’est pas envisageable car le champ gravitationnel de la comète est trop faible et irrégulier pour garantir que la sonde, sans contrôle, ne s’en échappera pas. De plus, alors que la comète se dirige vers son aphélie à 850 millions de kilomètres du Soleil, il est peu probable que ses réchauffeurs réussissent à maintenir une température à bord évitant la dégradation de ses systèmes.

Descente périlleuse

L’équipe de Rosetta va donc tenter un « baroud d’honneur » en rapprochant la sonde du noyau et en déclenchant sa chute vers la surface, depuis une altitude de 20 km, afin de mener des observations au plus près du noyau à l’aide d’une instrumentation bien plus puissante que celle du minuscule Philae.

À partir de la mi-août, la sonde va être manœuvrée sur des orbite excentriques l’amenant de plus en plus près du noyau, ce qui amènera les équipes de contrôle, à l’Esoc, le centre de contrôle opérationnel de l’ESA à Darmstadt (Allemagne), à se frotter aux irrégularités du champ gravitationnel du noyau, causé par sa forme bilobée asymétrique.

« La préparation de cette phase est en réalité bien plus complexe que ne l’était la préparation de l’atterrissage de Philae », estime Sylvain Lodiot, responsable des opérations de Rosetta à l’ESA. « Les dernières six semaines seront particulièrement difficiles et d’une certaine manière même plus risquées que la descente finale elle-même, car plus nous nous rapprocherons, plus nous subirons l’influence de son champ gravitationnel irrégulier, ce qui nécessitera plus un contrôle plus strict de la trajectoire, et donc plus de manœuvres, avec des cycles de préparation beaucoup plus courts. »

Pour la dernière trajectoire, l’ultime manœuvre sera déclenchée 12 heures avant l’impact. Celui-ci devrait se produire à une vitesse moitié moindre de celle de Philae, soit à environ 50 cm/s (moins de 2 km/h).

Il sera impossible pour la sonde de maintenir son antenne à grand gain pointée vers la Terre, et donc il est probable qu’aucune communication ne sera possible depuis la surface. Tous les systèmes de contrôle d’attitude et d’orbite seront coupés à l’impact.

Au plus près du noyau

Jusqu’ici, Rosetta n’a pu s’approcher que jusqu’à 5 km du noyau, le 30 mai. L’orbiteur était alors passé en mode de survie car les poussières éjectées par la comète avaient affolé les capteurs stellaires lui permettant de s’orienter. Pareille mésaventure lui était déjà arrivée le 28 mars 2015 à 14 km d’altitude, après un passage à 6 km le 14 février précédent. Par la suite, toutes les observations avaient été menées à plus de 30 km voire de 100 km de distance.

Le site de l’atterrissage de Rosetta n’a pas fait l’objet d’une décision définitive, mais il pourrait s’agir du site Agilkia, initialement sélectionné pour Philae, mais où celui-ci s’était contenté de rebondir pour retomber à plus d’un kilomètre de là, sur le site d’Abydos, dans une zone au relief plus prononcé.

Avec ses panneaux solaires, la sonde de 1 300 kg (hors ergols résiduels) a une envergure de 32 m.

Si Rosetta est la première sonde à avoir été jamais mise sur orbite autour d’une comète et Philae la première à s’y être posée en douceur, le 12 février 2001, la Nasa et la Johns-Hopkins University ont réussi à poser en douceur l’orbiteur NEAR Shoemaker (Near Earth Asteroid Rendezvous) de 470 kg et 5 m d’envergure à la surface de l’astéroïde 433 Eros, lui aussi de forme irrégulière (13 × 13 × 33 km). Le noyau de la comète 67P est composé de deux lobes mesurant respectivement 4,1 × 3,2 × 1,3 km et 2,5 × 2,5 × 2,0 km.

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