Cinquante ans après le premier vol de Concorde, les patrons d’Airbus et de Dassault ont exprimé leurs doutes sur l’intérêt de concevoir un nouveau supersonique commercial. Tom Enders a mis en avant les questions économiques et environnementales, Éric Trappier y a ajouté quelques considérations technologiques liées à l’aérodynamique. Le vol supersonique requiert un fuselage de faible diamètre ce qui se traduit par une cabine exiguë. Si l’on souhaite offrir au passager d’un long-courrier supersonique le type de confort auquel il a été habitué à bord des jets d’affaires ou des courts-courriers subsoniques, cela impose de concevoir un appareil aux dimensions déraisonnables au vu de son éventuelle rentabilité économique. Pour mémoire, le Concorde emportait moins de passagers que l’A220-100.
L’histoire aéronautique et spatiale est émaillée de concepts technologiques brillants qui se sont révélés ne pas correspondre aux besoins et aux réalités de leur époque : le supersonique commercial, la navette spatiale, le satellite de forte puissance pour la télévision HD analogique, la constellation de téléphonie mobile, le long-courrier quadriréacteur à deux ponts… Les difficultés financières rencontrées par OneWeb et soupçonnées chez SpaceX, comme l’incertitude sur le marché de Virgin Galactic, menacent de rallonger la liste.
« Je ne doute pas que les ingénieurs sachent le concevoir, mais est-ce que ça a un sens économique ? », s’interrogeait l’an dernier Tory Bruno, patron de ULA, à propos du lanceur réutilisable. Faut-il renoncer pour autant à étudier ces technologies ? Sûrement pas. Concorde a ouvert la voie à Airbus et les satellites TDF au haut débit actuel. Les conditions économiques changent mais la physique demeure et un investissement en R&D avisé peut rapporter bien plus qu’un projet commercial à contre-temps.
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