Ce serait un euphémisme de dire que la décision belge de choisir le F-35 américain a été mal reçue par les partenaires français et allemands. En revanche, elle a été applaudie du côté néerlandais. Faut-il vraiment y voir une trahison de l’idéal européen comme l’évoquait la presse hexagonale ou une simple illustration de la diversité des intérêts des différents pays qui composent l’Europe@nbsp;?
Si la France tient à étendre au niveau européen son ambition d’indépendance face aux grandes puissances, cet esprit de souveraineté n’est pas une priorité chez ses partenaires. L’histoire des siècles récents a guéri l’Allemagne de ce type de revendication. Si elle s’offusque du choix belge c’est avant tout parce qu’il prive son industrie d’un marché auquel une préférence européenne aurait dû donner accès. Côté néerlandais en revanche, l’interopérabilité des forces aériennes est vu comme un gage d’économies à venir.
La souveraineté belge militaire, qui allait de pair avec sa neutralité, n’a apporté que des misères au pays. Il est donc naturel que ce pays divisé ménageât la chèvre et le chou en s’engageant sous le parapluie américain, pour éviter qu’il ne mette à exécution sa menace de se désengager, tout en offrant à des alliés géographiquement plus proches des compensations dans le domaine des blindés. Après tout, la France et l’Allemagne auront toujours la plus grande peine à s’éloigner géographiquement de la Belgique alors que la politique américaine peut réserver des surprises. À Bruxelles, un engagement atlantiste de quarante ans peut donc être vu comme une garantie.
Les tergiversations sur la préférence européenne sont aussi au cœur des difficultés du programme Ariane 6. Elles relèvent de la même incompréhension entre les partenaires sur le sens et les objectifs d’une solidarité européenne.