In extremis, le projet de fonds européen de défense, doté de 13 Md€ sur sept ans, a été finalement adopté par le Parlement européen en avril. Son application et son budget seront définis par la nouvelle législature tout juste élue. Soixante-cinq ans après l’échec de la Communauté européenne de défense, le continent prend enfin la mesure de sa fragilité et décide de s’unir pour garantir son indépendance.
Ou cela ne serait-il qu’une illusion ?
Il est indiscutable que l’Europe – entité géographique, culturelle ou économique – a besoin elle aussi d’affirmer sa souveraineté, et il est de plus en plus nécessaire qu’elle montre ses muscles pour le faire.
Mais les freins sont nombreux contre ce projet, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Union européenne. Washington a engagé des actions de lobbying et de menaces de longue haleine pour dissuader ses chers alliés de s’affranchir des règles Itar. La participation des Britanniques, sur tous les grands projets de défense, va faire l’objet d’âpres négociations dans le cadre du Brexit. Et comment ouvrir ce fonds aux Britanniques sans y accepter les Américains ?
À l’intérieur de l’Europe même, les Polonais bataillent pour obtenir une base américaine sur leur territoire, et sont prêts à tout pour l’avoir. La question se pose également de la fiabilité des Allemands comme partenaires industriels de défense, dans un pays vieillissant qui préfère protéger ses retraites nationales plutôt que les frontières communes.
Ce fonds est une promesse, laissée à l’arbitrage d’un nouveau parlement qui va devoir prendre le temps de l’examiner. Pendant ce temps, le reste du monde continue à s’armer.