En empêchant les exportations du missile Meteor vers l’Arabie Saoudite, sous le prétexte que le royaume pourrait les utiliser contre l’inexistante aviation des rebelles yéménites, l’ Allemagne continue d’appliquer sa doctrine militaire héritée de l’après-guerre. Traumatisé par les crimes commis au nom du nazisme, le pays a choisi de faire passer par la représentation nationale – le Bundestag, chambre basse du parlement – toutes les décisions concernant les interventions militaires, mais également l’implication de son industrie dans des conflits. Aussi respectable soit-elle, cette politique démocratique se retrouve souvent confrontée à la réalité des faits et à l’urgence des événements. Alors que la France et la Grande-Bretagne envoyaient leurs avions en Libye en 2011, les parlementaires allemands négociaient âprement leur désaccord sur une intervention.
En sous-main pourtant, les Allemands mènent de nombreuses missions de renseignement pour leurs alliés, mais elles provoquent des scandales quand elles sont découvertes. En Libye, ils ont ainsi joué un rôle essentiel dans la localisation du dictateur en fuite. Le scandale est encore plus grand quand des équipements allemands sont repérés dans des missiles de « pays voyous », qui les ont acquis par des chemins de traverse.
Coincée entre une opinion publique anti-militariste et une industrie volontariste, la Bundeswehr produit des matériels qu’elle ne peut vendre et elle peine à recruter dans ses rangs. Une Allemagne vieillissante idéologiquement coincée dans un passé étouffant était-elle la meilleure partenaire pour concevoir le Scaf et plus largement la défense européenne du futur ? Ne va-t-elle pas étouffer les volontés d’indépendance de l’Europe ? La France en tout cas doit garder à l’esprit qu’il faut parfois d’abord compter sur soi-même.